Lama Jigmé Rinpoché - Extrait du livret "Amitabha, 1re partie" - Décembre 2009
Certains d’entre vous sont conscients de la vie, de son processus, et tendent vers l’accomplissement d’une certaine finalité qu’ils perçoivent comme importante. D’autres ne considèrent pas les choses sous cet angle : la vie est normale et ils avancent au gré des situations rencontrées, afin de se développer en fonction de ce qu'ils sont.Différentes pratiques conviennent à divers types d’individus, mais celle d'Amitabha est plus spécialement destinée à ceux qui se concentrent sur le chemin spirituel et elle pourra apporter, si elle est appliquée, de bons résultats en cette vie même. Il s’agit donc de se préparer. La pratique d’Amitabha est une de celles qui nous conviennent le mieux, et vous recevrez au cours de la semaine des instructions qui vous permettront de vous engager dans cette méditation en fonction du temps dont vous disposez.
Il en existe une version détaillée et une version courte. Toutes deux sont appropriées et permettent d’obtenir le résultat escompté. Il suffit juste de choisir celle qui est la plus adaptée à votre emploi du temps. La méditation d’Amitabha est effectuée mensuellement à Dhagpo Kagyu Ling. De nombreuses personnes vivant dans les alentours de Dhagpo sont à la retraite et leur but principal est de sortir du samsara, elles ont pour cela besoin d’outils simples. Nous avons tous des tendances et nous souhaitons tous changer ; des méthodes accessibles sont donc requises, sans qu'il soit nécessaire de réunir de nombreuses conditions pour les mettre en œuvre et obtenir de bons résultats.
Ceci constitue une préparation. Ensuite, vous pourrez poursuivre avec ces instructions ou aller plus loin ; il est en effet possible d’approfondir cette voie avec de nombreux enseignements et d’autres pratiques.
Le Vajrayana
Je vais, dans un premier temps, vous donner un aperçu de cette pratique mais aussi de toutes les pratiques du Vajrayana. Des questions récurrentes s'élèvent : pourquoi effectuer tant de méditations différentes ? Quel est leur but ? Lorsque nous n’avons pas la connaissance appropriée, nous attendons toujours quelque chose et essayons de saisir ce que nous faisons ; n'obtenant pas le résultat espéré, nous perdons alors intérêt et espoir. Nous nous jetons à corps perdu dans une pratique, mais si rien ne se passe, c’est qu’il y a une raison : nous devons savoir ce que nous faisons, ce qu’il est possible d’accomplir par ce biais et pourquoi. Si nous faisons des efforts sur cette base, le résultat sera meilleur. Nous pensons que quelque chose est à notre portée, mais nous ne savons pas exactement ce dont il s’agit ni ce qu’il faut vraiment mettre en œuvre pour l’obtenir ; nous nous contentons de suivre le mouvement et c’est ainsi que rien ne se produit vraiment. Je pense que bon nombre d’entre vous ont fait cette expérience. De manière générale, les méthodes proposées par les enseignements du Vajrayana sont très efficaces, et si une pratique est effectuée correctement, elle portera ses fruits. Cependant, pour obtenir de bons résultats, nous devons nous préparer, sinon le potentiel immense des enseignements ne sera pas actualisé. Par exemple, escalader une montagne et atteindre le sommet n’est pas impossible, mais sans préparation physique ni entraînement, même si la falaise semble facile, lorsque vous vous y essayerez, vous ne pourrez pas agripper la moindre pierre ! Les enseignements du Vajrayana renferment un grand potentiel mais ils présentent aussi des difficultés. De ce fait, il est nécessaire d'acquérir une certaine connaissance, de prendre le temps et de s’en référer à un guide approprié. De nombreuses conditions doivent être réunies afin de parvenir au résultat. Il ne s’agit pas d’une manipulation qui consisterait à dire que le Vajrayana est merveilleux alors qu’en fait rien ne se produirait, l’authenticité du Vajrayana est indéniable mais les conditions doivent être rassemblées. La manipulation, elle, est semblable à la publicité : la réalité ne coïncide pas toujours avec l’image proposée !
Le problème principal réside dans le fait que vous souhaitez atteindre le but fixé sans utiliser la méthode adéquate. En dépit de tous les efforts que vous déploierez, vous ne parviendrez jamais à atteindre le but initial de cette manière. Si vous souffrez d’un problème cardiaque mais que vous absorbez des médicaments pour le foie, vous ne résoudrez pas votre problème ! L’efficacité du médicament n’est pas en cause mais l’effet désiré ne se manifestera pas. Je n’essaie pas de vous détourner de la pratique du Vajrayana mais vous devez savoir ce que vous souhaitez obtenir et, en fonction de cela, effectuer la pratique. Les résultats seront alors à l’image de vos efforts.
Je souhaite aujourd’hui vous donner mon point de vue et mes conseils, je vous invite à les écouter et à réfléchir à ce qu’ils signifient vraiment. C’est ainsi que nous pourrons communiquer de façon adéquate, sinon lorsque je dis une chose, vous en comprenez une autre. L’expérience m’a montré que poursuivre ainsi ne fonctionne pas. Nous parvenons maintenant au cœur du sujet, ce qui demande d’échanger et d’expliquer, et par la suite, vous devrez clarifier l’ensemble par vous-mêmes. Une mauvaise compréhension de ce que je dis entraînerait une croyance erronée et à nouveau les erreurs habituelles !
La portée relative et la finalité absolue
Vous êtes intéressés par les pratiques du Vajrayana, vous essayez de vous y appliquer, peu à peu vous comprenez mieux toutes les implications et, sur cette base, votre idée change ; vous faites alors de nouveaux efforts, ce qui est tout à fait normal, c’est la façon d’agir de tout être humain. Ce que je souhaite préciser aujourd’hui au sujet de la pratique concerne l’accomplissement des deux finalités – relative et ultime – qui incluent tout.
La première a une portée relative. Les pratiques du Vajrayana visent l’absolu, mais elles peuvent aussi apporter de nombreux fruits au niveau relatif, tout au long de notre vie. Les résultats relatifs désignent les bonnes conditions de vie auxquelles nous aspirons, l’absence de souffrance, le fait d’être intelligent, prospère et d’obtenir tout ce dont nous avons besoin. Nous sommes parfois confus quant aux deux niveaux de réalité, relatif et absolu. Nous ne savons pas ce que nous recherchons ; en fait, le but est lié aux deux aspects. Si nous comprenons ce que nous pouvons accomplir, nous obtiendrons des retombées relatives et ce que nous mettons en œuvre permettra d’obtenir le fruit absolu. Par exemple, la pratique de Dorjé Sempa est une méthode très efficace pour atteindre l’éveil. Se concentrer uniquement sur celle-ci s’avère cependant délicat parce que vous devez respecter et préserver certaines conditions très précises en lien avec le Vajrayana. C'est une gageure ! Pour voler dans une fusée, il faut une certaine condition physique, sinon vous vous évanouissez au décollage ! En revanche, si vous parvenez à maintenir les conditions requises, vous pouvez atteindre l’éveil très rapidement. Vous pouvez lire les récits de libération de mahasiddha, de grands lamas, etc. Leur réalisation provient de ce qu’ils ont préservé les conditions nécessaires.
Vous engager dans ces pratiques sans pouvoir garantir les dispositions nécessaires apporte cependant un bienfait relatif. Par exemple, effectuer la pratique de Dorjé Sempa purifiera le karma négatif et, grâce à cela, vous améliorerez votre capacité à comprendre le Dharma, vous rencontrerez de meilleures conditions de vie, de travail, etc. qui vous permettront d’évoluer plus facilement sur le chemin spirituel. Parfois, tout ce que nous entreprenons échoue du fait de certaines causes karmiques ; d’autres personnes, au contraire, réussissent tout ce qu'elles entreprennent, c’est aussi pour des raisons karmiques. Mais tout ceci est relatif, et se concentrer sur ce niveau est plus aisé. Je ne dis pas qu’il est inutile d’appliquer et de préserver les conditions requises pour ces pratiques, mais qu’il s’avère difficile de viser l’ultime parce que les maintenir toutes précisément est très exigeant. Ce n’est pas notre faute, il s’agit de notre lot d’être humain. Une personne qui s’y consacre peut le faire, mais la façon dont nous vivons diminue les possibilités de réussite.
Il n’est donc pas inutile d’effectuer ces pratiques, mais il s’agit de reconnaître le but qu'il est possible d'atteindre par leur biais. Certaines pratiques du Vajrayana permettent, à un niveau relatif, de s’ouvrir à la compassion, de se purifier, d’obtenir des capacités pour être plus intelligent, d’avoir davantage de mérite pour contrebalancer de mauvaises conditions karmiques, tout cela afin d’accomplir davantage pour les autres. C’est la raison pour laquelle les lamas tibétains ont rendu disponibles ces pratiques à un grand nombre de pratiquants au lieu de les confiner au secret d’un petit groupe. Lorsque l’on s’engage individuellement dans ces méditations, elles apportent de très bons résultats sur le plan relatif.
Quand les premiers maîtres tibétains se rendirent en Inde, ces pratiques demeuraient sous le sceau du secret le plus total. Tout d’abord, trouver un maître du Vajrayana prenait beaucoup de temps, puis vous ne receviez pas immédiatement les instructions attendues ; le maître jaugeait votre engagement et, ensuite seulement, transmettait éventuellement l’enseignement. C’est la raison pour laquelle tous les individus qui reçurent les instructions de leur maître en obtinrent les résultats. Au Tibet, les lamas choisirent de rendre accessibles les enseignements parce que de bons résultats peuvent aussi être obtenus au niveau relatif.
Lorsque nous connaissons les résultats relatifs, nous savons quelle forme de refuge nous pouvons attendre de telle ou telle pratique.
Abordons maintenant la seconde finalité : le résultat absolu. Il s’agit de la même pratique, accompagnée des conditions requises ainsi que de votre propre reconnaissance. Reconnaissance signifie ici connaître la direction à prendre pour atteindre l’éveil et donc savoir ce que vous êtes et où vous êtes. C’est la raison pour laquelle Khenpo Ngédeun a débuté la transmission de L’Entrée en la connaissance*. Ce texte explique ce qu’est l’être humain et les liens entre les idées que nous entretenons et les notions qui nous poussent à une vision samsarique. Le changement qui pourra apporter la vision adéquate résultera de la connaissance de soi-même – je dois savoir ce qui me constitue et comprendre comment je fonctionne en tant qu’individu. Adopter une vision théiste en pensant être la créature de Dieu est assez facile mais le bouddhisme est plus compliqué ! Tant de raisons sont à l’origine de notre condition d’être humain, si nous n’en connaissons pas exactement les détails, nous ne sommes alors qu’une vague sur l’océan !
Il faut savoir ce qu’est l’esprit, ce qu'est l’interdépendance et connaître la vision duelle qui en découle, sans cela nous ne savons pas vraiment ce que nous faisons. Notre compréhension de la réalité doit être exacte afin de nous permettre d'acquérir une autre vision des choses, sinon nous resterons dépendants de notre croyance. En d’autres termes, il s’agit de savoir quelle vue permet d’atteindre l’éveil.**
Il faut aussi comprendre ce que nous cherchons, avoir une idée claire du sens du terme bouddha et de notre potentiel ou capacité. En connaissant notre propre potentiel, nous pourrons alors prétendre l’actualiser. Il faut donc savoir ce qu’est la nature ou l’essence d’un bouddha.***
Nous avons déjà abordé ces trois sujets****, nous les étudierons peu à peu en détail. Vous devez réfléchir à ces trois thèmes, vous familiariser avec eux pour les comprendre davantage. Ensuite, en appliquant des méthodes efficientes comme la pratique de Vajrasattva, vous ne chercherez pas seulement à vous purifier mais vous essayerez d’actualiser des qualités semblables à celles de Vajrasattva. Lorsque vous parviendrez à cela, vous serez libérés du samsara. Là est toute la difficulté, car les conditions sont exigeantes ; mais elles ne sont pas inaccessibles.
La pratique d’Amitabha
La pratique d’Amitabha appartient au Vajrayana mais reste accessible, car les conditions requises sont assez simples à réunir et à maintenir. Le résultat obtenu peut être l’éveil si vous fournissez les efforts nécessaires, mais même si vous ne parvenez pas à atteindre l’état de bouddha en cette vie, avec la combinaison de la pratique et des souhaits d’Amitabha, il est possible d’obtenir de bonnes conditions de renaissance afin de poursuivre le chemin commencé. Les instructions que vous recevrez par la suite vous permettront de comprendre ce que je veux dire.
D’autre part, chacun peut s’engager dans la pratique de façon personnelle, mais on peut aussi considérer les difficultés autour de soi : les gens meurent, tombent malades, doivent surmonter des problèmes. Ils peuvent être inclus dans notre méditation car cette pratique peut les aider. Par exemple, si aujourd’hui un de vos proches venait à mourir, vous souhaiteriez faire quelque chose pour lui mais n’en seriez pas capables. Vous pourriez faire des souhaits mais rien qui soit réellement efficace. En revanche, en vous engageant de manière continue dans la pratique d’Amitabha et, par la suite, en la combinant avec d’autres méditations, vous acquerrez la capacité de soutenir véritablement autrui. Des actions pratiques peuvent être entreprises ainsi que des actes spirituels. Si des animaux meurent, souffrent ou sont torturés, nous sommes impuissants malgré notre tristesse et nous ne sommes sûrs de rien quant à l’efficacité de nos souhaits. La pratique d’Amitabha nous sera utile sur un plan relatif dans de nombreux cas. Au niveau absolu, les conditions à mettre en place et les instructions à appliquer s’avèrent également plus simples car nous avons tous reçu des enseignements abordant la compassion et l’amour qui incluent tous les êtres, les conditions karmiques, etc. En combinant ces notions avec la méditation d'Amitabha, vous pourrez aider autrui ainsi que vous-mêmes.
Vous trouverez ensuite, dans ce livret, les instructions transmises par Shamar Rinpoché au sujet d’Amitabha. Lama Tréhor, pour sa part, enseigne les détails de la pratique afin que vous puissiez ensuite l’effectuer régulièrement. Je reprends, quant à moi, les thèmes abordés dans le passé en les reliant à vos besoins quotidiens. Progresser sur des sujets de trop haut vol fait parfois oublier les problèmes de tous les jours. Il est important de savoir comment évoluer au quotidien, cela vous aidera au niveau de votre engagement sur le chemin spirituel. Nous aborderons donc la vie humaine et les moyens de faire face à ce que nous rencontrons. Si nous ne savons pas gérer nos propres émotions ou notre attachement, les choses s’enveniment, alors que si nous connaissons la manière de les appréhender, tout est beaucoup plus facile. Grâce à la mise en œuvre de la pratique, la vie devient acceptable et porteuse de sens. Si vous n’êtes pas conscients de cela, les enseignements resteront de belles paroles inutiles.
Certains livrets sont disponibles en plusieurs langues (anglais, espagnol, italien). Vous pouvez vous les procurer sur place à Dhagpo Kagyu Ling tout au long de l’année.